Comment faites-vous pour rendre pour rendre les PMO essentiels pour les entreprises ?
Les PMO sont une espèce intéressante dans l’univers de la gestion de projet car ils sont confrontés à un paradoxe sous-jacent dans leur raison d’être. Les PMO existent pour répondre aux besoins de l’entreprise mais en principe, si tous les projets ont réussi, vous supposeriez qu’il n’y a pas besoin de PMO. Demander comment rendre les PMO essentiels pour les entreprises est en réalité une question clé qui devrait toujours être présente dans l’esprit des professionnels des PMO.
Selon moi, les PMO peuvent devenir essentiels s’ils adoptent trois impératifs clés :
- L’impératif Business : les PMO qui sont essentiels dans l’organisation sont centrés sur l’activité de l’entreprise et agissent en tant que partenaire de confiance qui permet la livraison de projets, c’est-à-dire que toutes les fonctions du PMO sont conçues pour servir l’entreprise. Les PMO doivent commencer à se considérer comme un service. Leur catalogue de services peut alors couvrir une variété d’activités, allant de la garantie que les projets soient livrés de la bonne manière (gestion de projet) à la garantie que les bons projets soient réalisés (gestion de portefeuille) et ce, avec le niveau de compétence approprié.
- L’impératif Agilité : alors que différentes méthodologies et approches ont été développées pour que les projets et les équipes de projet adoptent l’agilité, peu de choses sont dites sur les PMO. Cependant, les PMO sont probablement les entités organisationnelles qui en ont le plus besoin; non seulement ils informent et centralisent les pratiques de gestion de projet, mais ils ont également une mauvaise réputation d’organismes de soutien bureaucratiques et lents. Les PMO doivent également adopter Agile ! Ils doivent changer de position et passer du modèle top-down à celui de soutien, en se concentrant sur les capacités plutôt que sur le contrôle, et en permettant aux équipes de définir et de travailler avec le minimum de bureaucratie possible.
- L’impératif de valeur : la pierre angulaire des PMO. Vous trouverez certainement ce mot à la mode dans le mandat du PMO, dans la feuille de route du PMO ou dans toute présentation sur l’objectif du PMO. Les PMO sont conçus pour permettre la création de valeur, aidant l’entreprise à maximiser son rapport qualité-prix. À la base, les PMO sont tous axés sur la valeur. Cependant, la valeur est un concept subjectif et ce qui est précieux pour quelqu’un peut ne pas avoir de valeur pour une autre personne. La valeur réside aux yeux du spectateur. Ainsi, il est fondamental que les PMO commencent à considérer leurs parties prenantes comme des clients et qu’ils demandent ce que veulent ces clients s’ils veulent répondre à leurs attentes en termes de valeur. De plus, les PMO doivent commencer à mesurer leur propre valeur ajoutée – ils l’exigent des équipes de projet, alors pourquoi ne pas être transparents quant à leurs propres performances ? – et communiquer davantage.
En un mot, les PMO essentiels pour l’entreprise sont des servant leaders, passionnés par ce qu’ils font et capables de s’adapter aux besoins de l’entreprise avec agilité.
Comment est née votre passion pour les projets? Quelle est la chose que vous aimez le plus dans votre travail?
Ma carrière a débuté dans une société de conseil en gestion de projet. J’ai été en quelque sorte “contaminée” par l’énergie et la passion pour les projets de mes collègues et mentors. J’ai eu la chance d’apprendre auprès de personnes qui sont très expérimentées, compétentes, qui ont investi dans mon développement professionnel et personnel. S’il y a un conseil que je peux donner à tous ceux qui commencent dans le monde de la gestion de projet : trouver un bon mentor. C’est une expérience de vie enrichissante.
En tant que cheffe de projet, consultante et formatrice en gestion de projet, ce que j’aime le plus, c’est la diversité des industries, des types de projets et des dimensions avec lesquels je travaille. J’apprends toujours quelque chose de nouveau chaque jour. Un jour, je fais une évaluation de la maturité du PMO pour une entreprise traitant des déchets nucléaires, le lendemain, je donne un workshop puis je forme une équipe à l’utilisation d’un outil. Je suis très chanceuse de pouvoir travailler dans un secteur que j’aime et d’avoir appris et travaillé avec tant de sociétés et de personnes incroyables. Ce n’est pas un hasard si je me surnomme “The Lucky PM”!
Quel est le plus gros problème / changement que vous voyez dans la communauté de gestion de projet en ce moment?
Il y a de nombreux aspects qui méritent d’être mentionnés, mais je voudrais en souligner trois qui ne sont pas exclusifs à la communauté PM.
Le premier est la résistance à penser au-delà du statu quo, de la norme. Il faut commencer à réfléchir de manière plus critique sur la façon de gérer les projets, à contester davantage et à remettre en question. Nous évoluons dans une époque où il y a une surcharge d’informations et un corpus croissant de connaissances, nous ne devons pas simplement accepter des solutions «prêtes-à-porter», réfléchir rapidement et simplifier la réalité, mais plutôt explorer différentes perspectives et ne pas nous précipiter en mode solution lorsque le problème lui-même n’est pas clair ou quand il n’y a pas de solution simple.
Le second point concerne la conception de la gestion de projet comme une discipline “just-do-it” et les membres du projet comme des acteurs. Je pense qu’il y a beaucoup à perdre pour la profession si nous retirons notre responsabilité du front-end et de l’héritage de nos projets. Les projets changent le monde, littéralement, et comme le dit le proverbe «with great power comes great responsibility». Malheureusement, je vois souvent le pouvoir mais pas toujours la responsabilité.
Le dernier aspect concerne les opportunités manquées de concevoir plus de projets au service de l’humanité, ayant un impact global. Avec nos compétences, nous sommes dans une position privilégiée pour faire la différence et commencer à conduire une conscience pour la gestion de projet. Avec la récente pandémie, quelques bons exemples commencent à se montrer mais nous avons encore besoin d’une gestion de projet plus durable et responsable. Après tout, nos projets sont notre avenir.
Selon vous, quel est l’impact de la pandémie de Covid-19 sur les projets et la communauté?
Il ne fait aucun doute que le Covid-19 a changé le monde, à tel point que nous pouvons parler d’un avant Covid et d’un après Covid. Les projets ne font pas exception. Certains ont été annulés, reportés, les portefeuilles de travaux et les budgets ont dû être rapidement revus. Ce n’est pas entièrement une mauvaise chose. Pendant longtemps, nous avons entendu parler de la révolution nécessaire dans les pratiques de travail, avec les solutions d’auto-apprentissage, le travail flexible, les équipes à distance, etc. Que les organisations le veuillent ou non et qu’elles soient prêtes ou non, le moment est venu pour nous de tester le concept. Et surprise : pour de nombreuses organisations, cela fonctionne ! Nous n’avions pas besoin de toutes ces réunions, de tout cet espace de bureau, de toute la structure après tout. Le travail est toujours fait même s’il est fait à domicile. La même chose s’est produite avec la transformation numérique. Après des années de prédication à ce sujet, les entreprises ont été «forcées» de finalement faire quelque chose. Des projets au service de l’humanité naissent aussi de la crise, comme Tech4COVID19 ou PMOsHackingCovid, ce qui me rend fière de travailler dans la gestion de projet. Je pense qu’en tant que communauté, nous deviendrons plus flexibles, conscients, anti fragiles et, surtout, plus humains et conscients les uns des autres des suites du Covid-19.
Quels sont vos conseils pour résoudre / faire face à cette situation?
Je ne veux pas romancer le problème et je ne sais même pas s’il y a une solution. Pour le moment, je pense que le Covid-19 restera une situation à gérer plutôt qu’à résoudre, au moins jusqu’à ce qu’un vaccin soit disponible. Mais je crois aussi que nous ne sommes pas définis par les défis auxquels nous pouvons être confrontés mais par la façon dont nous y répondons. Par conséquent, je pense que cette crise nous donne la possibilité de décider, d’examiner son impact positif. La crise peut unir les gens. Au cours des dernières semaines, en particulier dans les pays les plus touchés par le virus, nous avons assisté à une multitude de gestes de gentillesse, de collaboration et de solidarité (comme pour remercier le travail des professionnels de santé), qui nous rappellent que nous ne sommes qu’une grande famille. Nous partageons les mêmes préoccupations, la même anxiété, les mêmes rêves et les mêmes craintes. Nous apprenons, souffrons et nous inspirons les uns les autres, peu importe où dans le monde. Nous sommes plus résistants que nous ne le pensons et nous sommes tous, ensemble, dans la même situation. Le fait est que Covid-19 est toujours présent, alors autant en tirer le meilleur, même s’il s’agit simplement d’encourager, de rassurer et de se soutenir les uns les autres.
Profitons de cette occasion pour réfléchir et revoir nos priorités, y compris dans nos PMO ! Prendre le temps de reconnaître notre fragilité et valoriser ce qui compte le plus, de dire «merci», «j’assure tes arrières» et «excellent travail!» plus souvent. Utiliser notre temps avec plus de sagesse et nous réinventer. Ensemble. Ne demandons pas ce qui se passerait si le monde se terminait avec cette crise, mais que pouvons-nous faire différemment dans nos projets et nos vies si le monde recommençait. Ceci est notre réveil. Une opportunité à ne pas manquer.
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